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Sale enfant de prof


Par où commencer ?

L’article du Monde, réducteur et généraliste, qui nous enferme dans des schémas tout faits, me déçoit beaucoup. On dirait que ce journaliste ne sait pas de quoi il parle. Il vit dans un monde merveilleux, on dirait, tant mieux pour lui.




Univers familier, certes. Quand j’étais petite et que je n’avais pas école le samedi et le mercredi matin, maman m’emmenait avec elle en cours. J’étais son assistante, je participais comme les élèves de sa classe, j’allais faire des photocopies ou chercher des documents, ce qui lui évitait de laisser la classe sans surveillance. (Dépendant de la classe, c’était plus ou moins dangereux. A notre époque, les élèves étaient relativement sages). Je la voyais corriger des copies le soir, je l’entendais parler d’auxiliaires modaux et d’IUFM, termes familiers mais vides de sens pour moi. Et les dimanches après-midi entiers à subir les enregistrements accélérés de Channel Five. Par contre, Big Muzzy, j'aimais bien et je le regardais à chaque fois. Certains amis de ma mère venaient passer des soirées à la maison, et quand je les avais comme prof quelques années après, ça faisait bizarre. Je les avais vus à la table de mes parents, jardiner, en promenade ou à la plage. Là ils étaient en position d'autorité. Mais ne vous inquiétez pas, je me tenais à carreaux.

Et Papa, avec sa valise et sa sacoche (Berk papa, contente que tu t’en sois débarrassé finalement, ça validait vraiment le stéréotype du prof de gauche, hahaha, en plus barbu. « Et le premier c’est un barbu, il est barbu par devant et barbu par derrière, jamais il n’aura ma main barbu de cette manière »). Papa qui lui, faisait vraiment une barrière hermétique entre le lycée et la famille. Papa lui, c’est plus tard quand on a été en âge de s’interroger sur la société, qu’il nous a parlé de son travail. Mon petit frère et moi avons entamé des études pour devenir prof, il nous a déconseillé de perdre trop de temps à ça, car il avait goûté aux prémices des générations qui s’en venaient et à leurs parents. Portrait bien dressé dans cet article d'ailleurs : http://www.rue89.com/2013/05/06/chers-parents-deleves-emmerdez-242098 . Mais Papa a encouragé notre goût pour la linguistique et l'histoire. Merci Papa. Je n'ai pas été scolarisée dans son lycée, mais j'y allais de temps en temps, co-animer la démonstration du labo de langues par exemple, ou réaliser un mini reportage. Les collègues à Papa, je les aimais beaucoup, parce qu'ils étaient comme lui, et que je ne les avais pas eus en cours. Parfois j'allais manifester avec eux contre les mesures du gouvernement. C'était bon enfant.

Vous savez, les enfants sont méchants entre eux. Être enfant de prof, ça ne donne pas de protection particulière. On morfle autant que les autres. Doublement je ne sais pas, mais ce qui est sûr c'est que d'un côté on encaisse les brimades des élèves, de l'autre on subit la pression des adultes, pour qui on doit être un exemple de maturité pour nos camarades. Et se retenir de leur casser le nez alors qu'on se fait insulter. Eh, on est peut être enfant de prof, mais on est avant tout des enfants. Demandez à l'adolescente que j'étais d'être mature. Certes, je me contrôlais dans la cour, mais en rentrant je tuais des monstres ou des nazis sur Doom ou Wolfenstein. Vous savez, ce type de jeux où on voit le bout du fusil dans le bas de l'écran. (Quand je pense à ceux qui disent que les jeux vidéos violents sont la cause des fusillades dans les écoles, ça me fait bien rire. Si je n'avais pas eu ces jeux là pour évacuer ma rage, j'aurais probablement été violente à l'école. Bel euphémisme d'ailleurs). Bref, grâce à eux, je suis une belle jeune femme brillante et épanouie, dit-elle exécutant un mouvement de tête au ralenti faisant voler ses cheveux comme dans la pub pour le shampoing.

Premier de la classe, mon œil. A regarder mes bulletins scolaires, j’étais plutôt au ras des pâquerettes d’une manière générale. Certes, je n'en foutais pas une en anglais et j'avais de très bonnes notes. Moyen en français et histoire géo, passable en allemand (langue que j'avais choisie pour ne pas être avec toutes les pouffiasses qui prenaient espagnol). Pour le reste, plus on s'approchait des sciences, plus les notes descendaient. Et en Art et Musique, alors que tout le monde avait des 18, je tournais à 13. Faut dire que je n'ai jamais été douée en dessin. Et pour la musique, je n'ai jamais su la lire, mais comme je jouais (et je joue toujours) à l'oreille, ça s'équilibrait. Je me souviens des notes sur la portée, ça me faisait penser à des petites fourmis. Je m'égare.

Je n'ai eu Maman en cours qu'une année et tout au long de ma scolarité au collège elle savait tout de suite quelles notes j'avais eues. Avant tout le monde, dès l'impression des bulletins. Et les commentaires de ses collègues qui m'enseignaient, elle les avait aussi avant tout le monde. Alors non, pas facile d'être enfant de prof et encore moins d'être scolarisée dans le même établissement. Je me souviens une fois j'ai eu une nouvelle prof fraîchement arrivée au collège. J'ai demandé à ma mère de ne pas lui dire qu'elle était ma mère. Je voulais être traitée comme les autres, juste une fois. Alors bien sûr, ça a marché jusqu'à la première réunion parent-prof. Bon l'avantage c'est qu'elle ne s'était doutée de rien, vu que ma mère et moi ne nous ressemblons pas. J'ai donc eu quelques mois de répit.

J'avais aussi des avantages. Je m'entendais bien avec la principale. Avant la rentrée, je lui faisais un dessin ou lui écrivais un poème, accompagné d'un gentil mot et de la liste des profs que je voulais avoir. En général, elle suivait mes « recommendations ». Quand elle est décédée quelques années après, j'étais la seule élève à ses funérailles, sur les milliers de collégiens présents pendant sa carrière au collège.

Par contre la sous principale, elle ne m'aimait pas vraiment. Un jour, j'ai lancé une boule de papier sur une élève en perm (élève qui me frappait souvent pendant la récré). La pionne l'a vu, et prise d'un excès de zèle elle m'a envoyée directement chez la sous principale, surnommée Obersturmfürher. Bien évidemment, je n'ai pas eu le temps de justifier mon acte. (Ce jour là j'ai appris que les adultes étaient à mille lieues de savoir ce qui se passait entre les cours). Bref, me voilà dans le bureau de Schloum. Je me suis pris un savon, et elle a pensé bon d'ajouter ''Ce n'est pas parce que tu es la fille de Martine que tu es au dessus des lois''. Et elle a poursuivi « Je ne dirai rien à ta mère pour cette fois ». J'ai fermé ma gueule, comme d'habitude, mais dès que j'ai revu ma mère je lui ai tout de suite dit que j'avais été convoquée chez Doom (On l'appellait comme ça aussi). Je ne me souviens pas de sa réaction mais elle a probablement abondé dans le sens de sa supérieure. Quand je pense que j'ai revu la sous principale des années plus tard en maillot de bain sur une plage, ça casse le mythe..

Et les idées reçues dans tout ça ?
Quand j'étais à la fac, je faisais du co-voiturage. Celle qui était propriétaire de la voiture, que nous appellerons Claire, était fille d'ouvriers.
A l'époque déjà, le prix du carburant fluctuait, donc le prix du trajet aussi. Un jour, le prix a baissé. Une copine passagère, que nous appellerons Morgane, m'a avoué plusieurs mois après que les prix du trajet de toutes les autres avait baissé, en concordance avec la baisse du prix du carburant, sauf le mien. Quand elle lui a demandé pourquoi mon prix était le seul à être resté au prix le plus fort, Claire a répondu : ''Ses parents sont profs, ils n'ont qu'à lui acheter une voiture."
Ben oui quoi, sale bourge, tes parents sont profs alors tu vas raquer.




La chance que mes frères et moi avons eue, c'est d'avoir des parents comme les nôtres. Ils auraient pu être plombiers, ministres ou directeurs de Super U Plabennec, ça aurait été pareil. Peut être qu'on a été ''privilegiés'' parce qu'on avait des livres à la maison et qu'ils nous ont emmenés en voyage, mais de là à l'attribuer à la profession de nos parents, c'est nul.




Si, le journaliste a raison sur un point : Aujourd'hui, je suis prof comme mes parents. Pour adultes.

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