Maman
26 Novembre
Maman elle a le truc pour me faire faire ce que j'aime pas.
En fait c'est un peu de ma faute. J'aime pas les gens. J'aime pas les enfants. J'aime pas les néons. Et quand Maman veut ma compagnie, vu qu'on se voit pas souvent, elle m'emmène faire des courses.
Et elle sait tout ça en plus.
'' - Pupuce (c'est comme ça qu'elle m'appelle), je vais faire une ptite course, j'en n'ai pas pour longtemps. Tu veux venir avec moi ? me demande-t-elle en penchant la tête.
[Non, pas ses yeux, ne regarde pas ses yeux !!!]
- Vite fait, hein [Trop tard, je me suis encore fait avoir].
- Oui, juste un saut à la banque.
- [Bon, ça devrait aller] OK mais je reste dans la voiture.''
Exterieur jour, voiture.
Moi [ouvrant grand les yeux] : - C'est pas la route de la banque... Hinnnnnnn [commençant à me balancer comme Dustin Hoffman dans Rain Man]
Maman : - J'ai juste une petite course à faire avant.
La voiture se dirige vers le supermarché. Je regarde Maman les yeux révulsés, la bouche ouverte, et j'imite la petite Regan dans L'Exorciste (Bon ok j'exagère un peu). Je m'apprête à ouvrir la portière de la voiture en cours de marche, en m'assurant que Maman s'en aperçoit.
- Arrête ! fait-elle semblant de se mettre en colère et verrouillant les portes avec la commande électrique.
On se gare. J'entre dans le magasin en faisant la grimace.
Bon, l'avantage avec Maman, c'est qu'elle fait les courses rapidement, contrairement à Papa qui drague la poissonnière et qui traine dans les rayons comme si c'était la première fois qu'il voyait tous les produits. Surtout qu'il achète les mêmes trucs depuis 20 ans.. [Moi ? Mauvaise langue ?]
Bref, j'ai trouvé le truc, je pilote le caddie. Normalement, c'est rapide.
Sauf si Maman croise quelqu'un qu'elle connait. Alors là, c'est foutu, y'en a pour des heures. En plus, Maman, elle est connue comme la louve blanche sur la presqu'île. (Le loup blanc, c'est Gégé, mon beau père). Je pourrais me mettre à cracher de la purée verte et parler en Araméen, ça passerait inaperçu, Maman parle avec la dame. De leurs projets de navigation, des repas à droite à gauche chez les pontes de la jet-set Rhuysienne, et de gens que je connais pas. [Faites qu'elle n'aborde pas mon sujet.... Fais chier, c'est raté.]
- Aaaaaah ! C'est ta fille ? C'est toi la Canadienne ? Alors, raconte ! C'est bien là bas ?
- [Ben oui, tu vois, je m'éclate tellement que je suis rentrée et que je livre des pizzas à mi-temps. Mon frère gagne plus que moi à toucher le chômage en restant chez lui et mon collègue qui a arrêté l'école à 16 ans fait plus de pourboires que moi.] Ah non, ça je peux pas le dire. Oui, réponds-je simplement. Bon Maman, on y va ? demande-je à la grande dame brune qui m'a traînée ici par une ruse dont elle seule a le secret.
C'est pas malpoli ce que je fais, ça fait bien dix minutes qu'elles causent alors qu'elles se voient deux jours après. Les néons commencent à m'agresser les yeux [Je suis sérieuse, je vois tout trouble et les bruits aux alentours commencent à faire monter la pression en moi].
On se dirige [enfin] vers la caisse. Maman, tu vas pas t'en tirer comme ça. Je vais te foutre la honte devant tout le monde.
- Je veux un bonbon, dis-je calmement en regardant l'étalage.
Maman fait semblant de ne pas m'entendre.
- JE VEUX UN BONBON !!! répète-je en pleurnichant et en piétinant.
La caissière et les clients nous regardent hébétés. Ils attendent la réaction de Maman, devant sa fille de 28 ans qui fait un caprice pour une friandise. C'est vrai que c'est un peu surréaliste. [Mais c'est mon moment préféré].
Alors là, 2 scénarios se présentent : Soit Maman me menace d'une gifle et je prends la caissière comme témoin de ma maltraitance. Soit Maman me fait un bisou en souriant et je soupire, en lui reprochant de même pas jouer le jeu. Les clients reprennent leur respiration. Et on s'en va. Moi je m'en fous, je connais personne, ça me fait rire. Maman, elle, n'a même pas eu honte. [Je l'aurai un jour, je l'aurai !!]
On retourne à la voiture. Ah, là c'est la route de la banque.
- Je te préviens, cette fois ci je reste dans la voiture.
Maman va à la banque, elle y reste toujours deux heures. [Presque autant que de tours dans le spi] Moi je reste dans la voiture en double file. Je regarde les gens qui passent. Et je me moque d'eux. Ces trouducs de Parigos avec leurs tricots rayés et leurs vareuses, qui s'arrêtent devant les boutiques hors de prix. C'est ça, crachez la thune, bande de c°°°°°°. Les alcolos du coin, les couples qui font tellement la gueule qu'ils seraient mieux pas ensemble. Maman revient enfin.
- Mais tirez vous bande de c°°°°°° ! crie-je aux conducteurs qui ne savent pas où aller dans les rues de Sarzeau. [Je suis juste passagère]
- Pupuuuuuuce ! me houspille Maman.
Après, soit on rentre directement, soit on va sur la tombe d'Anna [ce sera un autre chapitre], soit au Mouca, le bar où je travaillais il y a quelques années.
- Haaaaaaa c'est ma Nanaëlle !!!! hurle Eric en me voyant, de sa douce voix de crécelle suave.
S'il fait semblant d'être dans un mauvais jour, il dit à Maman qu'elle n'était pas obligée de m'emmener avec elle. S'il décide d'être dans un bon jour, et après avoir fait mille compliments à Maman, il me fait 7 ou 8 bises. Quand il a terminé, je m'arrange pour me tourner vers des clients et je m'essuie grossièrement les joues en faisant la grimace. En plus, Eric, il pique.
Si Yann est là, il se fend d'une gentillesse du type :
- Oh.. elle est encore là celle-là ? Franchement Martine, t'aurais pu la laisser à la maison. [''Martine", c'est comme ça que l'appellent les autres. Sauf Gégé, lui il dit "Bibiche" quand il a un truc à lui demander. Comment ça, je suis encore mauvaise langue ? Mais euh ! Aïe (ça c'est Tonton qui me pique la cuisse avec sa fourchette à table) ]
Comme Eric continue à m'envoyer des hostilités, je réponds des fausses méchancetés du genre que ça me fait mal au coeur de voir des gens venir acheter du pain congelé du supermarché (Le Mouca fait le meilleur pain de la presqu'ile depuis 3 générations), et qu'en plus il vole les clients avec ses prix exhorbitants et qu'il paye mal ses employés. Des trucs comme ça. En général, il abonde dans mon sens, et ça devient un sketch.
- Dites donc, vous en avez mis du temps, fait semblant de rouspéter Gégé de son faux ton inquisiteur.
- Y'avait du monde à la caisse.''
Voilà le genre de moment que j'aime partager avec Maman. Ce sont des moments précieux, et je ne me demande plus pourquoi je me fais piéger à chaque fois. Je saute à pieds joints dedans. Parce que la vie est courte, donc mieux vaut qu'elle soit belle.
En fait c'est un peu de ma faute. J'aime pas les gens. J'aime pas les enfants. J'aime pas les néons. Et quand Maman veut ma compagnie, vu qu'on se voit pas souvent, elle m'emmène faire des courses.
Et elle sait tout ça en plus.
'' - Pupuce (c'est comme ça qu'elle m'appelle), je vais faire une ptite course, j'en n'ai pas pour longtemps. Tu veux venir avec moi ? me demande-t-elle en penchant la tête.
[Non, pas ses yeux, ne regarde pas ses yeux !!!]
- Vite fait, hein [Trop tard, je me suis encore fait avoir].
- Oui, juste un saut à la banque.
- [Bon, ça devrait aller] OK mais je reste dans la voiture.''
Exterieur jour, voiture.
Moi [ouvrant grand les yeux] : - C'est pas la route de la banque... Hinnnnnnn [commençant à me balancer comme Dustin Hoffman dans Rain Man]
Maman : - J'ai juste une petite course à faire avant.
La voiture se dirige vers le supermarché. Je regarde Maman les yeux révulsés, la bouche ouverte, et j'imite la petite Regan dans L'Exorciste (Bon ok j'exagère un peu). Je m'apprête à ouvrir la portière de la voiture en cours de marche, en m'assurant que Maman s'en aperçoit.
- Arrête ! fait-elle semblant de se mettre en colère et verrouillant les portes avec la commande électrique.
On se gare. J'entre dans le magasin en faisant la grimace.
Bon, l'avantage avec Maman, c'est qu'elle fait les courses rapidement, contrairement à Papa qui drague la poissonnière et qui traine dans les rayons comme si c'était la première fois qu'il voyait tous les produits. Surtout qu'il achète les mêmes trucs depuis 20 ans.. [Moi ? Mauvaise langue ?]
Bref, j'ai trouvé le truc, je pilote le caddie. Normalement, c'est rapide.
Sauf si Maman croise quelqu'un qu'elle connait. Alors là, c'est foutu, y'en a pour des heures. En plus, Maman, elle est connue comme la louve blanche sur la presqu'île. (Le loup blanc, c'est Gégé, mon beau père). Je pourrais me mettre à cracher de la purée verte et parler en Araméen, ça passerait inaperçu, Maman parle avec la dame. De leurs projets de navigation, des repas à droite à gauche chez les pontes de la jet-set Rhuysienne, et de gens que je connais pas. [Faites qu'elle n'aborde pas mon sujet.... Fais chier, c'est raté.]
- Aaaaaah ! C'est ta fille ? C'est toi la Canadienne ? Alors, raconte ! C'est bien là bas ?
- [Ben oui, tu vois, je m'éclate tellement que je suis rentrée et que je livre des pizzas à mi-temps. Mon frère gagne plus que moi à toucher le chômage en restant chez lui et mon collègue qui a arrêté l'école à 16 ans fait plus de pourboires que moi.] Ah non, ça je peux pas le dire. Oui, réponds-je simplement. Bon Maman, on y va ? demande-je à la grande dame brune qui m'a traînée ici par une ruse dont elle seule a le secret.
C'est pas malpoli ce que je fais, ça fait bien dix minutes qu'elles causent alors qu'elles se voient deux jours après. Les néons commencent à m'agresser les yeux [Je suis sérieuse, je vois tout trouble et les bruits aux alentours commencent à faire monter la pression en moi].
On se dirige [enfin] vers la caisse. Maman, tu vas pas t'en tirer comme ça. Je vais te foutre la honte devant tout le monde.
- Je veux un bonbon, dis-je calmement en regardant l'étalage.
Maman fait semblant de ne pas m'entendre.
- JE VEUX UN BONBON !!! répète-je en pleurnichant et en piétinant.
La caissière et les clients nous regardent hébétés. Ils attendent la réaction de Maman, devant sa fille de 28 ans qui fait un caprice pour une friandise. C'est vrai que c'est un peu surréaliste. [Mais c'est mon moment préféré].
Alors là, 2 scénarios se présentent : Soit Maman me menace d'une gifle et je prends la caissière comme témoin de ma maltraitance. Soit Maman me fait un bisou en souriant et je soupire, en lui reprochant de même pas jouer le jeu. Les clients reprennent leur respiration. Et on s'en va. Moi je m'en fous, je connais personne, ça me fait rire. Maman, elle, n'a même pas eu honte. [Je l'aurai un jour, je l'aurai !!]
On retourne à la voiture. Ah, là c'est la route de la banque.
- Je te préviens, cette fois ci je reste dans la voiture.
Maman va à la banque, elle y reste toujours deux heures. [Presque autant que de tours dans le spi] Moi je reste dans la voiture en double file. Je regarde les gens qui passent. Et je me moque d'eux. Ces trouducs de Parigos avec leurs tricots rayés et leurs vareuses, qui s'arrêtent devant les boutiques hors de prix. C'est ça, crachez la thune, bande de c°°°°°°. Les alcolos du coin, les couples qui font tellement la gueule qu'ils seraient mieux pas ensemble. Maman revient enfin.
- Mais tirez vous bande de c°°°°°° ! crie-je aux conducteurs qui ne savent pas où aller dans les rues de Sarzeau. [Je suis juste passagère]
- Pupuuuuuuce ! me houspille Maman.
Après, soit on rentre directement, soit on va sur la tombe d'Anna [ce sera un autre chapitre], soit au Mouca, le bar où je travaillais il y a quelques années.
- Haaaaaaa c'est ma Nanaëlle !!!! hurle Eric en me voyant, de sa douce voix de crécelle suave.
S'il fait semblant d'être dans un mauvais jour, il dit à Maman qu'elle n'était pas obligée de m'emmener avec elle. S'il décide d'être dans un bon jour, et après avoir fait mille compliments à Maman, il me fait 7 ou 8 bises. Quand il a terminé, je m'arrange pour me tourner vers des clients et je m'essuie grossièrement les joues en faisant la grimace. En plus, Eric, il pique.
Si Yann est là, il se fend d'une gentillesse du type :
- Oh.. elle est encore là celle-là ? Franchement Martine, t'aurais pu la laisser à la maison. [''Martine", c'est comme ça que l'appellent les autres. Sauf Gégé, lui il dit "Bibiche" quand il a un truc à lui demander. Comment ça, je suis encore mauvaise langue ? Mais euh ! Aïe (ça c'est Tonton qui me pique la cuisse avec sa fourchette à table) ]
Comme Eric continue à m'envoyer des hostilités, je réponds des fausses méchancetés du genre que ça me fait mal au coeur de voir des gens venir acheter du pain congelé du supermarché (Le Mouca fait le meilleur pain de la presqu'ile depuis 3 générations), et qu'en plus il vole les clients avec ses prix exhorbitants et qu'il paye mal ses employés. Des trucs comme ça. En général, il abonde dans mon sens, et ça devient un sketch.
- Dites donc, vous en avez mis du temps, fait semblant de rouspéter Gégé de son faux ton inquisiteur.
- Y'avait du monde à la caisse.''
Voilà le genre de moment que j'aime partager avec Maman. Ce sont des moments précieux, et je ne me demande plus pourquoi je me fais piéger à chaque fois. Je saute à pieds joints dedans. Parce que la vie est courte, donc mieux vaut qu'elle soit belle.